Archéomed, l'archéologie en milieu éducatif

Archéomed, l'archéologie en milieu éducatif

Samedi 5 décembre 2009 : Oppidum de Roquefavour

Le nom de Roquefavour évoque avant tout un aqueduc construit entre 1841 et 1847, destiné à conduire l'eau de la Durance vers Marseille, et considéré comme le plus grand ouvrage de pierre au monde. Mais, sur la commune de Ventabren, au-dessus de la partie nord de l'aqueduc, on trouve aussi un oppidum intéressant à plus d'un titre.


Tout d'abord, il s'agit d'un des plus grands de la Provence occidentale, avec presque six hectares de superficie. On y parvient par le nord, et le premier vestige visible est une partie de rempart, d'une taille considérable. M. Musso, notre guide, profite de ce lieu stratégique pour nous faire l'historique du site.

Ce point élevé, d'où l'on a une vue superbe sur la région s'étendant de la chaîne de la Trévaresse à celle de l'Etoile, avec en ligne de mire plusieurs sites de hauteur majeurs comme Entremont, a été occupé dès le 4ème/3ème siècle avant JC, mais les vestiges de cette époque sont très rares. Les vestiges reconnus et partiellement fouillés montrent un début d'occupation aux alentours de 60 avant JC, et un abandon (sans destruction) vers 25 avant JC. On ignore les raisons de la construction de cet oppidum, mais Strabon nous dit que les armées romaines ont mis quatre-vingts ans pour progresser de trente kilomètres dans la Provence intérieure. On peut imaginer une utilisation de ce site lors de cette période, mais dans quel but ? Garnison ? Entrepôt à proximité de la riche vallée de l'Arc ?

Le rempart, à l'entrée du site, se présente comme une construction de trois mètres d'épaisseur, avec parement intérieur et extérieur, et remplissage de pierres. Le parement extérieur laisse apparaître des blocs de taille imposante, et ce qu'on devine être des stèles. Étant donné qu'aucune nécropole préromaine n'a été retrouvée dans la région, comme c'est le cas habituellement dans cette partie occidentale de la Provence, peut-être que les stèles viennent d'une nécropole voisine qui aurait été dépouillée de ces pierres. Mais rien n'est sûr. En avant du rempart, à l'extérieur, un fossé sec avait été aménagé, précédé lui-même d'un espace important jonché de pierres dressées pouvant empêcher l'approche d'engins lourds. Une telle défense, on l'imagine, a dû être fort coûteuse.

Les fouilles ont débuté à l'est, sur le haut d'un à-pic permettant de voir l'ensemble de la région déjà mentionnée. On pouvait penser que cette situation impliquerait la présence de bâtiments importants, donc riches en vestiges. Une salle de 32 m² entourée de banquettes en pierre a donc été dégagée. On y a trouvé cinq pointes de javelots, fabriquées par repliement et non par coulage, ce qui renvoie bien à un contexte du premier siècle avant JC. Il devait s'agir d'une sorte de salle des gardes, probablement surmontée d'une structure en bois.

Plus au sud, une très grande structure formée de murs en pierres, de 120 m², a été dégagée, avec une sortie à l'est, mais sans aucun vestige. On peut s'interroger sur la fonction de ce grand espace bordé au sud par une « rue » particulièrement large.

En revenant plus à l'ouest, on trouve un ensemble d'habitations, aux murs à angles droits, parfois directement construits sur le substrat rocheux qui a même été entaillé pour ce faire à certains endroits. On n'y a retrouvé aucun clou de charpente, ou presque, ce qui laisse penser que les habitations avaient pour la plupart des toits de chaume. Ces unités d'habitation étaient constituées d'une, deux ou trois pièces. L'un de ces « deux pièces » était composé d'une pièce de vie au fond, et possédait un four à pain, dans la pièce donnant sur la rue.


Une unité d'habitation présente trois pièces, avec une ouverture sur une rue au nord, et une ouverture sur une autre rue, au sud. On peut penser qu'une communication a été établie entre deux parties distinctes du bâtiment, par arrachement des pierres constituant le mur mitoyen. On aurait ainsi, et plus classiquement, un « deux pièces » contigu à un « une pièce ». C'est la seule habitation où du matériel intéressant a été retrouvé, notamment de la céramique arétine. On a aussi retrouvé un petit marteau. Les seuils sont assez rudimentaires. On remarque dans la rue deux massifs le long des façades correspondant probablement à des départs d'escaliers pour accéder à un étage.

L'ensemble du site n'a été que très partiellement fouillé, le matériel récolté est fort pauvre, décevant même, si l'on considère la taille de l'oppidum. On a l'impression qu'un nettoyage en règle a présidé à son abandon. Cependant une visite au petit musée d'archéologie, au centre du charmant village de Ventabren, permet de se faire une idée plus juste des conditions de vie sur le site au 1er siècle avant notre ère. On y voit des fragments de céramique, parfois quelques pièces entières, quelques monnaies, et des objets en métal tels que des fibules ou les pointes de javelot citées plus haut. Une jolie visite conduite par M. Musso, passionné et fort peu avare de précisions sur les fouilles et les découvertes !


Pour plus d'informations, vous pouvez consulter le site du GEAV dont s'occupe M. Musso 

Jean-Rémy Turgis

 



03/01/2010

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